191E0543.TXT
PL. COUVIN 191E
E.Maillieux
Décembre 1913
543 (II)
Carrière près du cimetière de Boussu.
Récif du Tienne de Boussu. - Trois coupes remarquables entament le massif
calcaire, au flanc Nort duquel s'adosse le village de Boussu-en-Fagne.
La première coupe no 541, f.g.h. met à découvert, le long du chemin de
Boussu à l'Ermitage, à peu près toute la série régulièrement superposée des
couches du Frasnien moyen, à laquelle il ne manque que les récifs rouges de
base et du sommet.
En bas de la côté, en face de l'Ecole communale, une carrière abondonnée
montre, de la base au sommet (voir fig. 6, Coupe C):
a. Schistes gris homogènes à Camarophoria megistana, puis schistes gris
avec quelques bancs de calcaire gris interstratifiés (= F2f).
b. Calcaire gris stratifié à Cryphaeus et Cyrtoceras (= F2g). - Inclinaison
48°N. (soubassement du récif).
c. Calcaire gris massif, montrant la forme typique de l'extrémité
occidentale inférieure du récif à Pachystroma (= F2h).
Fig. 5. - CROQUIS MONTRANT L'ALLURE PLANIMETRIQUE DES COUCHES AU MASSIF DU
TIENNE DE BOUSSU, ET LA DISPOSITION DES PLANS PAR LESQUELS
PASSENT LES COUPES A, B ET C DE LA FIGURE 6.
Fig. 6. - COUPES JUXTAPOSEES EN CONNEXION, SUIVANT TROIS PLANS PARALLELES,
DIRIGES DU SUD AU NORD (VOIR A, B, C DU CROQUIS FIG.5). LE PLAN A
EST DISTANT DU PLAN B D'ENVIURON 80 METRES. LE PLAN C EST SITUE A
ENVIRON 460 METRES A L'OUEST DU PLAN B.
La base est inclinée de 48° vers le Nord; le sommet est convexement
arrondi, son plan supérieur étant incliné de 20' vers le Nord, et son plan
inférieur faisant avec l'horizon un angle de 72°. (Voir fig.6, coupe C et
pl.IV, fig.1).
On remarquera que l'angle du plan supérieur est, à peu de chose près, le
complément de l'angle du plan inférieur. Dans sa région axiale, le récif
atteint environ 15 mètres de hauteur.
d. Calcaire gris stratifié, comme en h (sédiments d'envasement de la base
du récif (= F2g). Inclinaison: 60°N.
e. Schistes à Sp. pachyrhynchus (= F2i).
i. schistes à Buchiola palmata (= F3b).
La deuxième coupe (fig.6, coupe B) est visible à la carrière près du
cimetière de Boussu. On y observe:
a. Calcaire gris massif, interrompu par de nombreuses terrasses d'arrêt
irrégulière. Amas considérables de Stromatoporides et d'Algues
calcaires. Inclinaison du plan supérieur: 60°N. (= F2h).
b. Schistes noduleux avec accumulation prodigieuse de Polypiers
(Acervularia, Cyathophyllum, Heliophyllum, Favosites, Alveolites, etc.)
de Brachiopodes et de Crinoïdes. Epaisseur: 8 à 10 mètres. Zone à
Sp.pachyrhynchus (= F2i).
c. Calcaire rouge massif (= f2j), visible sur environ 3m50 à 4 mètres.
C'est une portion de l'extrémité occidentale d'un récif de calcaire
rouge à Acervularia superposé au récif à Pachystroma. Le plan inférieur
et le plan supérieur du lambeau de calcaire rouge convergfent fortement
vers le bas, le premier ayant un pendage de 60°N. et le second un
pendage de 80°N.
Le soubassement de ce petit récif est constitué par les schistes à
Sp.pachyrhynchus qui ont terminé l'envasement du récif sous-jacent à
Pachystroma.
h. Schistes à Acervularia, etc., commen en e (= F2i), envasant la partie
inférieure du récif rouge.
i. Schistes à Buchiola palmata (= F5b).
Enfin, à environ 80 mètres plus à l'Est, grâce aux roches affleurantes
ainsi qu'à une petite tranchée de reconnaissance, on peut se faire une
idée, absolument précise, de la succesion des couches dans la région axiale
des deux récifs (voir fig.6, coupe A et pl. IV, fig 2):
c. Calcaire gris massif, à Pachystroma (F2h).
e. Schistes à Sp.pachyrhynchus et Acervularia (8 à 10 mètres) formant à
la fois l'envasement terminal du récif F2h et le soubassement du petit
récif F2j.
f. calcaire rouge, massif (F2j) à Acervularia et Stromatactis.
g. Calcaire gris bleu, massif, à Stromatactis, Acervularia, Receptaculites,
etc. Faune conchyliologique extrêmenent abondante, répartie dans des
dépressions ou bien ensevelies dans un milieu cadavérique formé par les
restes de Stromatactis (= F2j.) On observe, répartif dans la masse
calcaire, des rognons de dolomie.
i. Schistes à Buchiola palmata (= F3b), envasant le sommet du petit récif
rouge.
Les observations qui précèdent nous amènent aux conclusions suivantes:
I. Le massif de Boussu est constitué par deux récifs superposés de très
inégale importance, mais dont la forme générale est identique et
rappelle celle d'un dôme à base très élargie et fortement coincée, ce
qui confirme pleinement les observations de M. Delhaye à l'égard de la
forme de récifs. A la base, se trouve un récif à Pachystroma; au sommet,
de schistes de 8 à 10 mètres d'épaisseur, et tous deux apparaissent en
allure redressée.
Fig. 8. - COUPE SCHEMATIQUE A TRAVERS LE FRASNIEN, PASSANT PAR L'AXE DES
RECIFS DE BOUSSU-EN-FAGNE ET COMPLETEE D'APRES LA COUPE DU CHEMIN
DE L'ERMITAGE.
a. Calcaire F1a. Frasnien inférieur.
b. Calcaire F1b.
c. Schistes F2a. Frasnien moyen.
d. Schistes F2b.
e. Calcaire F2c.
f. Schistes F2c.
g. Schistes F2f.
h. Calcaire F2g.
i. Récif F2h.
j. Schistes F2i.
kl. Récif F2j.
m. Schistes F3b Franien supérieur.
II. Le récif à Pachystroma est dû essentiellement à l'activité
physiologique des Hydrozoaires et des Algues calcaires; il s'est
développé sur un soubassement de calcaire gris, stratifié F2g qui, de
plus, a envasé la partie inférieure du récif, et l'envasement de
celui-ci s'est poursuivi, puis terminé par le dépôt des schistes. F2i à
Spirifer pachyrhynchus.
Donc: le récif à Pachystroma de Boussu est contemporain du calcaire
stratifié F2g, auquel il passe latéralement à sa base, et il a continué
à s'édifier pendant que se déposaient les schistes F2i à
Sp.pachyrhynchus; puis son développement s'est arrêté pour des causes
encore inconnues, mais que j'attribue au fait, que les Hydrozoaires qui
l'ont formé étaient vraisemblablement adaptés à un milieu plus profond
et que leur activité physiologique a pris fin, lorsqu'il atteignirent
un niveau trop rapproché de la surface pour leur permettre de continuer
à y trouver des conditions biologiques favorables.
L'envasement du récif s'est terminé à l'aide des schistes F2i à
Sp.pachyrhynchus.
III. La colline sous-marine ayant ainsi atteint une région bathymétrique
éminemment favorable à la croissance et à la multiplication des
Zoanthaires, la vie, chez ces derniers, acquit une intensité
merveilleuse, et ils s'y développèrent en d'innombrables colonies, que
nous retrouvons en position de vie, enlisées dans les schistes
d'envasement des flancs et surtout du sommet du récif.
De cette accumulation intense d'organismes constructeurs résulta la
formation d'un second récif, d'importance beaucoup moindre et de
nature différente de celle du récif sous-jacent: c'est un récif de
Zoanthaires et d'Alcyonnaires, entièrement contemporain des schistes
à Sp.pachyrhynchus qui en constituent le soubassement et qui
l'envasèrent jusqu'au moment où, alors qu'il avait atteint la phase du
niveau calcaire moyen, l'accentuation de l'oscillation descendante du
fond de la mer amena bruqement celui-ci à un isobathe franchement
bathyal, où les organismes constructeurs trouvèrent une mort rapide.
L'enlisement du récif se termina par le dépôt des schistes de Matagne.
Les deux récifs de Boussu sont arasés au-dessous de leur axe
respectif, comme l'indique la convergence vers le bas, chez l'un comme
chez l'autre, des deux plans de la base et du sommet: on ne peut donc
se faire une idée exacte de leur puissance.
Dans leut état actuel, au point de leur plus forte expansion, qui doit
être néanmoins voisin de la région axiale, la largeur d'affleurement
du récif à Pachystroma atteint environ 225 à 230 mètres. Si l'on tient
compte de l'angle de pendage du plan de base, qui est de 48°N., on
constate qu'en ce point la puissance de la masse F2h atteint à peu
près 170 mètres.
Quant au récif à Acervularia, dont la largeur d'affleurement est de
45 mètres environ et dont l'angle d'inclinaison du plan de base est
de 60°N., sa puissance ne dépasse guère 35 à 36 mètres.
Même en ne tenant pas compte que dans la région axiale elle-même,
actuellement disparue, cette puissance a sans doute été plus forte
encore, si l'on ajoute à ces deux données la puissance (8 à 10 mètres)
des schistes qui séparent les deux récifs, on atteint une hauteur
totale de 216 mètres, qui dépasse sensiblement l'isobathe inférieur
de la région néritique.
Vue de la carrière de Boussu, près du cimetière, montrant la superposition
du récif à Acervularia (F2j) au-dessus du récif à Pachystroma (F2h).
Profil oriental du massif de Boussu-en-Fagne montrant deux récifs
superposés (F2h et F2j).
Les schistes à Sp.pachyrhynchus situés entre le récif a Pachystroma et le
récif à Avervularia sont extrêmement fossilifères.
Les polypiers y foisonnent. Leur colonies atteignent fréquemment une grande
taille. Les Brachiopodes y sont très communs. Peu de mollusques et peu de
trilobites.
Les formes suivantes s'y rencontrent surtout:
Cyathophyllum hexaghonum
Heliophyllum helianthoides
Acervulvaria Davidsoni
Acervularia pentagona
Acervularia Goldfusse
Alveolites subaequalis
Alveolites suborbicularis
Favosites cervicornis et boloniense etc.etc.
Spirifer acutosinus
Spirifer Verneuili
Spirifer bifidus
Spirifer Sauvagei
Spirifer pachyrhynchus
Cyrtina Rigauxi
Cyrtina Douvillei
Athyris concentrica
Athyris Bayeti
Athyris Davidsoni
Athyris Oehlerti
Camarophoria megistana
Rhynchonella boloniensis
Rhynchonella cuboides
Rhynchonella pugnus
Rhynchonella Barroisi
Douvillina Gosseleti
Douvillina latissima
Douvillina retrorsa
Douvillina Dutertrii
Productella Larminati
Strophalosia productoides
Strophalosia membranacea
Schizophoria striatula
Rhipidonella dumontiana
Skenidium Deshayesi
Pentamerus globus
Pentamerus biplicatus
Pentamerus brevirostris
Merista plebeja
Dielasma elongata
Melocrinus inornatus
Melocrinus Dorlodoti
Melocrinus Dewalquii
Taxocrinus Beyrichi
Le calcaire gris (niveau moyen du récif à Acervularia) = F2j est également
très riche en fossiles. (Matériaux non encore étudiés).
Enfin, le calcaire à Pachystroma F2h renferme outre des Stromatopores, des
Algues calcaires et des Stromatactis.