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179E0001.TXT

PL. BIHAIN 179E

1

Annales de la Société géologique de Belgique. Liège, 1911, tome XXXVIII (Bull.),
pp. 209-214.

Note sur la salmite, le rutile et la tourmaline d'Ottré, (5)

PAR

H. De Rauw

Lors d'une excursion à Ottré en compagnie de M. le professeur Lohest, nous avons
trouvé dans les roches provenant d'un filon de quartz et pyrophillite, un
minéral vert différent de la chlorite, qu'il nous a paru intéressant d'examiner.
M. le professeur Cesàro, à qui je soumis les échantillons, me conseilla d'en
faire l'étude optique et chimique.

Etant ultérieurement retourné sur les lieux et ayant fait effectuer quelques
travaux dans ce filon, j'ai receuilli une assez grande quantité de ce minéral
et ai pu me rendre compte de son mode de gisement.

Le filon, qui est situé dans l'une des dernières excavations au S-E d'Ottré,
recoupe les couches de phyllade violet à coticule. Il est constitué par un gros
banc de quartz, sous lequel se trouve un banc moins puissant contenant :
quartz, pyrophillite, andalousite, davreuxite, qui ont été signalés par divers
géologues (1), et le minéral en question qui est plutôt localisé vers la partie
inférieure.

Il se présente sous forme de tables vert-jaunâtre foncé, atteignant parfois 4 à
5 mm de dimensions, englobées dans le quartz, plus rarement dans la pyrophyllite
et le plus souvent irrégulièrement groupées en agrégats volumineux; parfois les
tables sont très petites et leur groupement tellement serré que l'ensemble prend
alors l'aspect d'une roche grenue.

Le minéral a une densité de 3.47. Il raie l'apatite, est rayé par l'orthose et
très faiblement par une pointe d'acier. On peut donc lui attribuer une dureté de
5.5 ou même légèrement inférieure.

Les tables sont souvent incurvées; elles présentent un clivage basal très net,
donnant des lamelles vert-jaunâtre brillantes à éclat lustré.

Au microscope on voit apparaître trois autres clivages perpendiculaires au
premier, se coupant sous des angles de 60°; ils sont moins faciles que le
clivage basal mais cependant suffisamment nets pour que lors du polissage de
la lame, les petits éclats qui s'en détachent présentent la forme de triangles
équilatéraux; le fait se produit encore lorsqu'on veut lever une lame de clivage
basal. Ce dernier possède une biréfringence excessivement faible; il montre la
bissectrice aiguë positive presque normale. La trace du plan des axes optiques
est parallèle à la trace de l'un des clivages perpendiculaires à la base.

Dans les lames minces, la petitesse de la biréfringence qui les fait paraître
isotropes, jointe aux formes triangulaires des petites plages, pourrait les
faire prendre pour des lames de clivage de fluorine, si ce n'était la dureté
considérable de la substance.

Entre nicols croisés les lames de clivage basal se montrent formées par l'as-
semblage de petites plages irrégulières s'éteignant à 60° les unes des autres.

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(1) Ann. Soc. Géol. Belg. - L. De Koninck: t.V, p. LXXXIII; - Fr. Dewalque:
t.VI, p. CXLIX; Malaise: t.V, p. CXXXVIII. - Bul. Ac. Roy. Belg., t.XLVI,
p.240.
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Dans les lames taillées perpendiculairement à la base, les traces du clivage
basal donnent de minces bandes à allongement négatif qui s'éteignent à peu près
simultanément.

Les coupes faites dans le minéral montrent qu'il est polichroïque: suivant le
clivage basal il a une teinte jaune-verdâtre foncé qui passe au vert-olive par
une rotation de 90°; la différence de teinte est toutefois peu sensible. Perpen-
diculairement, la couleur de l'incolore légèrement bleuté au vert-olive.

Ces caractères permettent de rapporter le minéral à la chloritoïde. On peut
cependant remarquer que tous ses clivages sont beaucoup plus faciles et plus
nets que dans la chloritoïde proprement dite et que son polichroïsme est moins
intense, surtout pour la teinte bleutée; de plus, comme le montrent les figures
schématiques ci-dessous, il y a interversion des teintes du polichroïsme compa-
rativement à celles indiquées par M.M. Lévy et Lacroix (1)

Fig.

Je tiens à adresser tous mes remerciements à M. le professeur Cesàro qui m'a
encouragé de ses conseils et a bien voulu faire tailler les lames nécessaires
à l'étude optique du minéral.

MM. L. De Koninck et E. Prost ayant signalé à Vielsalm une variété magnésifère
de chloritoïde dénommée Salmite par Dumont, j'ai recherché si le minéral d'Ottré
devait être rapporté à cette variété (2).

Pour obtenir la substance dans un état de pureté suffisant pour permettre des
analyses quantitatives précises, les morceaux de quartz contenant le minéral ont
été réduits en poudre, qui a d'abord été soumise à un lavage à l'eau pour en
éliminer les parties poussiéreuses, puis traitée à différentes reprises par la
liqueur de Thoulet sursaturée, de densité 3,3. J'ai ainsi obtenu le minéral pur,
ne contenant plus que quelques traces de quartz englobé dans les cristaux; ce
quartz a d'ailleurs encore été éliminé par l'analyse, comme nous le verrons plus
loin.

Sur cette matière dessèchée à 100°, j'ai effectué une série de dosages des
éléments entrant dans la formule chimique. Ces dosages ont été refaits un grand
nombre de fois en collaboration avec M. Joassart, assistant au laboratoire de
chimie analytique de l'Université, dans le but d'éliminer autant que possible
les erreurs des opérateurs.

Dans ces dosages des soins spéciaux ont été apportés aux dosages des éléments
primordiaux. Pour l'alumine les précipités ont été redissous puis reprécipités
quatre fois et le précipité final, après calcination, purifié par l'acide
fluorhydrique ou le bisulfate de potassium.

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(1) M. Lévy et A. Lacroix. Les minéraux des roches, p.170.
(2) L. De Koninck. Bull. Soc. Géol. Belg., t.VI, p.LXXIX.
E. Prost. La salmite de Dumont. Mém. Soc. Géol. Belg., t.I, p.93.
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La séparation du quartz et de la silice combinée ainsi que le dosage du fer à
l'état ferreux s'effectuent en attaquant la substance pendant plusieurs heures
en tube scellé et privé d'air par de l'acide sulfurique de densité 2,3 à une
température de 230° à 250°.

Après attaque, le fer à l'état ferreux est dosé par le permanganate; la silice
après calcination fournit la teneur en silice totale; elle est alors traitée par
une solution bouillante et concentrée de carbonate sodique qui dissout la silice
amorphe (combinée) et laisse la silice qui se trouvait à l'état de quartz dans
la substance.

Ce procédé de dosage a l'avantage de permettre l'analyse d'une matière impure
renfermant une quantité quelconque de quartz qu'une séparation mécanique ne peut
éliminer. Par suite de la présence de sels ferreux dans la substance, le dosage
de l'eau a dû se faire par pesée directe de celle-ci. Le dépôt de l'eau ne se
produisant qu'à la température du rouge, montre qu'elle est bien à l'état
combiné dans le minéral.

Les résultats des analyses, correspondant à la moyenne de 50 dosages, sont
consignés dans le tableau suivant. Le première colonne correspond à la composi-
tion centésimale de la substance analysée, la seconde à la composition
centésimale du minéral à l'état de pureté complet, les suivantes à la composi-
tion et au rapport moléculaires :

Composition Composition du minéral pur Rapport
de la substance en % en molécules moléculaire
brute en %

SiO2(quartz 2.12
SiO2(combiné) 23.38 23.94 0.400 0.400 4
Ai2O3 33.57 34.38 0.338 0.351 3.5
Fe2O3 2.01 2.06 0.013 0.351 3.5
FeO 9.10 9.37 0.131 0.501 5
MnO 16.63 17.03 0.241 0.501 5
MgO 4.40 4.50 0.112 0.501 5
CaO 0.91 0.93 0.017 0.501 5
P2O5 0.65 0.67 0.005 0.501 5
H2O(combinée) 6.96 7.13 0.395 0.395 4
----------------------
99.79 100.01

La formule du minéral est donc :

3,5 (Al2. Fe2) O3
4 Si O2
5 (Fe. Mn. Ca. Mg)0
4 (H20.

Ce silicate dérive de l'acide SiO2. 5H2O (*) qui est bien l'acide dont dérive la
chloritoïde. En effet, A.Lacroix indique comme formule brute de la chloritoïde -
H2 F"e A12 Si 07 -, qui correspond exactement à l'acide SiO2. 5H2O (1). Dans
notre minéral la proportion de radical R2O3 est moins forte et celle de RO plus
forte que dans la chloritoïde type.

En comparant l'analyse ci-dessus aux résultats indiqués par M. Prost pour la
salmite de Vielsalm, on constate que le minéral d'Ottré contient moins de A12O3,
Fe2O3, et FeO mais que les teneurs de MgO et CaO sont plus élevées et surtout
que la proportion de MnO est double.

Le minéral d'Ottré est donc un Salmite très manganésifère.

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(*) Exactement 4,9
(1) A. Lacroix. Minéralogie de la France et de ses colonies, t.I,p.367.
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J'adresse tous mes remercîments à M. le professeur De Koninck qui a bien voulu
me donner l'hospitalité dans son laboratoire où ces analyses ont été effectuées.
Je remercie également M. Joassart de la part qu'il a prise dans cette longue
série de dosages.

En recherchant des échantillons de salmite pour l'étude de ce minéral, j'ai
rencontré dans les géodes du quartz, ou plus rarement englobés dans celui-ci, de
petits cristaux rouges que j'ai reconnus depuis être du rutile qui a déjà été
signalé à Ottré (1).

Ces cristaux, dont les plus grands atteignent à peine 1 mm de longueur et les
plus petits 1/10 de mm, ont des formes cristallines très nettes. La marche
géniculée si fréquente dans le rutile est ici extrêmement rare ; les cristaux
sont généralement isolés et implantés sur le quartz.

Leur coloration rouge brunâtre pourrait les faire confondre à première vue avec
de la dewalquite si ce n'était leur forme cristalline et leur infusibilité. En
outre, leur biréfringence excessivement élévée se manifeste par l'impossibilité
de modifier la teinte de polarisation par le biseau de quartz; cependant dans un
très petit cristal ayant 12x6 centièmes de millimètre de dimensions, on arrive à
déterminer que le minéral est positif, attendu qu'on peut modifier sa teinte de
polarisation par une forte épaisseur de biseaux de quartz croisé.

En examinant au microscope les cristaux extraites des géodes de quartz, j'y ai
trouvé de nombreuses aiguilles de tourmaline bleutée.

Ces aiguilles, visibles seulement au microscope, n'ont au maximum que 2/10 de mm
de longueur.

J'ai également rencontré entre les cristaux de salmite ou de quartz des veines
et des agglomérats de kaolin, qui doit être considéré comme le résultat de
l'altération de cristaux de feldspath existant primitivement dans la roche.

La rencontre de salmite, de rutile, de tourmaline et de feldspath porte à huit
le nombre de minéraux trouvés dans le filon de pyrophilite d'Ottré.

Laboratoires de Géologie de l'Université.
Mai 1911.

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(1) Bull. Soc. Géol. Belg., L. De Koninck, t. IV, p.CVII; Malaise, t. V,
p.CXXXVIII.

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