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163W0002.TXT

PL. MERBES-LE-CHATEAU 163W
A.RUTOT

2

A.RUTOT.- Compte rendu des excursions de la session extraordinaire de la
Société belge de géologie, de paléontologie et d'Hydrologie dans le Hainaut
et aux environs de Bruxelles du 23 au 27 août 1902.
(Bull. de la Soc. belge de géol., tôme XVII, 1903, Mém. pp.430-431) (4)

II. - Découverte d'une tortue du genre "Trionyx" dans le Landenien
supérieur d'une sablière à Grand-Reng.

Dans le compte rendu de la première journée d'excursion, je disais, à
propos des sablières existant à proximité de la station de Grand-Reng,
qu'aucune trouvaille paléontologique n'y avait été faite jusqu'ici.

J'ajoutais que le temps nous avait fait défaut pour en étudier la partie
supérieure.

Ces deux lacunes ont pu être remplies en 1903.

En effet, ayant été appelé, au commencement de mai, à aller constater le
gisement d'une tourtue fossile que l'on venait de découvrir, j'ai pu, pa la
même occasion, étudier à loisir l'ensemble complet des couches visibles
dans les deux sablières et notamment la partie supérieure.

Dans une note intitulée: Découverte d'une tortue du genre "Trionyx" dans le
Landenien supérieur du Hainaut (1), j'ai déjà fourni les détails de la
découverte et le résultat de l'étude complète des sablières.

Je rappellerai simplement ici que toute la hauteur des sablières - sauf
l'extrême sommet, qui montre des lambeaux de Quaternaire moséen et hesbay-
en, - peut être attribuée au Landenien supérieur, qui se subdivise en deux
facies superposés, l'inférieur formé de sables grossiers fluviaux, à stra-
tification oblique et entrecroisée, le supérieur constitué d'alternances de
sable plus fin, à stratification plus régulière, et de grandes lentilles de
marne blanche ou grise plus ou moins épaisses.

La tortue, du genre Tionyx, admirablement conservée et de 0m70 de longueur,
reposait vers le sommet du facies grossier inférieur, à environ 30 cen-
timètres sous la première lentille marneuse du niveau supérieur.

Je n'ai donc pas vu, à Grand-Reng, de représentant certain de l'Ypresien
au-dessus du Landenien.

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2 et 2bis

A.RUTOT.- Compte rendu des excursions de la session extraordinaire de la
Société belge de géologie, de paléontologie et d'Hydrologie dans le Hainaut
et aux environs de Bruxelles du 23 au 27 août 1902.
(Bull. de la Soc. belge de géol., tôme XVII, 1903, Mém. pp.394-416) (4)

II. - Les sablières de Grand-Reng.

L'heure s'avançant, nous avond dû quitter le gisement d'Erquelinnes pour
nous diriger au Nord vers la gare de Grand-Reng.

Le long du trajet, nous avons rencontré une quantité de sablières, ouvertes
autrefois, fermées de nous jours à cause de questions douanières.

En effet, avant 1890, il existait dans la région, tant en France qu'en
Belgique, de grandes scieries de marbre, à l'usage desquelles le sable
grossier du Landenien supérieur était utilisé.

La consommation de marbre étant naturellement moindre en Belgique qu'en
France, presque tous les marbres sciés en Belgique étaient expédiés en
France.

Les marbriers français s'étant plaints de la concurrence, des droits
d'entrée élevés ont été établis, de telle sorte que toutes les scieries
belges ont été anéanties d'un coup.

D'où fermeture de toutes les sablières.

Vers 11 heures, nous sommes arrivés à la gare de Grand-Reng, à côté de
laquelle s'ouvrent les deux seules sablières restées en exploitation du
côté belge.

Depuis que M. Rutot a exploré la région, l'une de ces sablières a pris un
développement énorme et elle présente actuellement des talus de plus de 20
mètres de hauteur.

Nous n'avons quère pu étudier que les parties abordables, le sommet n'ayant
pu être atteint.

La sablière paraît être creusée en entier dans le Landenien supérieure.
Nulle part la base du dépôt n'est visible et encore moins le substratum.
On se sait au juste si c'est le Landenien inférieur marin ou la craie.

Vers le bas, on voit, comme à Erquelinnes, des sables blanchâtres, gros-
siers, à stratification irrégulière et entrecroisée; plus haut apparaissent
dans le sable de nombreuses lentilles de marne blanche, renfermant égale-
ment de rares empreintes végétales: tiges, feuilles, etc.

A divers niveaux apparaissent les linéoles noires, ligniteuses.
Malgré la surveillance exercée, aucun reste de mollusque ni de vertébré n'a
été trouvé dans cette immense sablière, ni dans sa voisine.

Discussion. - Coupe d'oeil général sur le Landenien de Belgique.

En présence de cette magnifique coupe, M. Rutot a demandé de pouvoir s'ex-
pliquer sur la question du Landenien inférieur et du Landenien supérieur.

M. Rutot rappelle qu'il a effectué l'étude monographique compléte du Lande-
nien de Belgique, et de l'ensemble de ses observations il résulte que si,
au point de vue du facies et au point de vue pratique du levé géologique et
de l'industrie, il y a avantage à diviser l'étage landenien en deux assi-
ses, l'une inférieure marine, l'autre supérieure fluviale, comme l'ont fait
Dumont et beaucoup de géologues belges, il n'en est pas de même au point de
vue strictement scientifique.

Tous les sédiments landeniens ont été déposés pendant une oscillation du
sol, c'est-à-dire pendant un affaissement suivi d'un soulèvement, de sorte
qu'au point de vue théorique aucune subdivision n'es à faire.

On sait, en effet, que notre base de subdivision en unités stratigraphiques
ou étages est l'oscillation du sol, ayant donné naissance à l'ensemble
caractéristique des sédiments qu'avec. M. E.Van den Broeck nous avons
appelé cycle sédimentaire.

Or, en réalité, toute la partie orientale du bassin landenien de Belgique,
c'est-à-dire celle qui a été soumise plus spécialement à l'oscillation
marine, offre sur la majeure partie de son étendue un cycle sédimentaire
marin unique, constitué comme suit, dans sa position normale:

4. L1d. Sable d'émersion.
3. L1c. Argile sableuse plus ou moins durcie et concrétionnée, de fond.
2. L1b. Sable très glauconifère, d'immersion.
1. L1a. Gravier de base et, localement, argile plastique poldérienne.

Telle est la composition normale de l'étage landenien dans le bassin marin,
entre le sommet du Heersien - qui, appartenant à un tout autre bassin et à
une tout autre oscillation, constitue bien à nos yeux un étage, autonome et
non une dépendance du Landenien (1) - et la base de l'Yprésien.

(1) Il doit être bien entendu qu'au point de vue de synchronisme général,
M. Rutot admet très bien que l'ensemble de l'étage heersien et de
l'étage landenien puisse être assimilé à ce que l'on est convenu
d'appeler, en France, étage thanetien; mais cela n'est nullement
démontré.

Que s'est-il passé pendant la grande oscillation landenienne?

Par suite de l'affaissement du sol, la mer a envahi notre territoire,
probablement par la frontière du Hainaut, venant du bassin franco-anglais.

Le long des littoraux successifs, les eaux ont remanié les éléments cail-
louteux qu'elles ont rencontrés à la surface, les ont dispersés et en
partie roulés, de manière à former le gravier de base L1a.

Au large du littoral se sont déposés les sables d'immersion L1b, puis, lors
de l'envahissement marin maximum, les dépôts argileux L1c ont été aban-
donnés sur les points les plus profonds, là où l'eau était le plus tran-
quille.

L1a, L1b et L1c se sont donc déposés partout dans le bassin landenien.

Pendant que se déposait L1c, la deuxième partie de l'oscillation, c'est-à-
dire le soulévement, à commencé à se produire, et c'est à partir de ce
moment que se montrent, peu à peu, les changements de facies.

Dans toutes les régions à rivages simples, le seul dépôt qui se soit pro-
duit est le sable d'émersion L1d, mais l'émersion était évidemment accom-
pagnée de la retraite de la mer vers une région située probablement à
l'Ouest. Or, en deux points de notre territoire, vers Erquelinnes, d'une
part, vers Landen, de l'autre, il existe toutes les évidences possibles de
l'existence de deux fleuves ou de deux bras d'un même fleuve important
venant des Ardennes et se jetant le long des rivages Sud-Est de la mer
landenienne.

Puisque, pendant l'émersion, les rivages reculaient vers le Nord-Ouest, les
fleuves suivirent nécessairement la mer en retraite, et selon le point où
l'on se place, il vinrent jeter une perturbation plus ou moins profonde au
milieu du dépôt sableux marin normal d'émersion L1d.

Selon que l'on se place tout à fait sur le bord du courant fluvial ou au
milieu de ce courant, on constate aisément le plus ou moins de trouble
apporté dans la sédimentation par les effets mécaniques du courant fluvial.
(Voir les figures 2, 3 et 4.)

Ces effets se remarquent surtout facilement en Hesbaye, parce que le bras
du fleuve landenien qui s'y jetait dans la mer est sensiblement moins large
et moins puissant que celui qui se jetait vers Erquelinnes, et aussi parce
qu'il se trouve en entier sur le territoire belge, ce qui nous a permis de
l'étudier d'une manière complète, grâce au levé détaillé de la Carte géo-
logique (2).

(2) Voir, pour justification partielle parue, les Explications des
feuilles: Landen, Saint-Rond et Heers, du Service de la Carte
géologique du royaume, levée et publiée à l'échelle du 20 000e, sous la
direction de M. E.Dupont. Tete relatif à l'Eocène par M. A.Rutot.

Si nous nous plaçons sur le bord du courant fluvial, vers Perwez d'une part
(rive gauche), vers Saint-Trond ou Léau d'autre part (rive droite), nous
constations un passage insensible vertical et latéral entre le sable pure-
ment marin L1d et ce que l'on est convenu d'appeler le "Landenien supér-
ieur". (Voir fig. 2.)

On voit le sable marin d'émersion L1d perdre peu à peu sa glauconie, de
gris-vert passer au blanc et devenir un peu plus grossier. En même temps,
la stratification devient mieux marquée et elle a une tendance à devenir
ondulée au lieu d'être régulière et horizontale.

Au fur et à mesure qu'on se rapproche de Landen, centre du courant fluvial,
on constate la disparition progressive et continue du facies marin d'émer-
sion et son remplacment équivalent par du sable blanc à allure de plus en
plus irrégulière et tourmentée; en outre, des taches ligniteuses, des lits
noirs ligniteux, des alternances d'argile ou de marne se montrent vers le
sommet des sables non glauconifères.

Bientôt, en se rapprochant de Landen, la séparation nette qu'il était
impossible de préciser entre L1d et le facies noté L2, c'est-à-dire entre
le Landenien inférieur et le Landenien supérieur, se précise; en effet, des
lits graveleux apparaissent à la base des sables L2 et, vers Orp-le Grand
et Landen, un lit ocntinu de cailloux, comme à Erquelinnes, indique une
séparation nette et précise entre les deux termes du Landenien.

Fig. 2. - COUPE-DIAGRAMME ENTRE PERWEZ, LANDEN ET SAINT-TROND MONTRANT LES
RELATIONS EXISTANT ENTRE LES LANDENIEN INFERIEUR MARIN ET LE
SOI-DISANT LANDENIEN SUPERIEUR.

P. Terrains primaires.
C. Terrain crétacé.
H. Etage heersien.
a. Gravier base du landenien inférieur (L1a).
b. Sable glauconifère d'immersion (L1b).
c. Sable argileux plus ou moins durci (L1c).
d. Sable fin de l'émersion marine (L1d).
m. Gravier de base du Landenien supérieur (L2), localisé vers le milieu du
courant fluvial, surmonté de sables blancs, grossiers, à stratification
oblique et entrecroisée, comme à Erquelinnes.
n. Sable blanc plus régulièrement stratifié, caractérisant un courant moins
rapide que celui indiqué par le sable grossier précédent et renfermant
des lentilles de marne blanche qui, en se décalcarisant, se tranforment
en lentilles d'argile grise, pure et plastiqur (1).

(1) L'effet de cette décalcarisation s'observe très bien dans les lentilles
épaisses. On y voit nettement l'argile grise d'altération sur tout le
pourtour de la lentille, tandis que le centre est resté marne blanche
normale.


Fig. 3. - COUPE-DIAGRAMME ENTRE WAVRE, TIRLEMONT ET LEAU, MONTRANT LES
RELATIONS EXISTANT ENTRE LE LANDENIEN INFERIEUR ET LE LANDENIEN
SUPERIEUR FLUVIO-MARIN.

P. Terrain primaire.
C. Terrain crétacé.
H. Etage heersien.
a. Gravier de base du Landenien marin (L1a).
b. Sable d'immersion (L1b).
c. Sable argileux plus ou moins durci (L1c).
d. Sable glauconifère d'émersion (L1d).
m. Sables blancs plus ou moins grossiers, rarement graveleux, à
stratification entrecroisée vers le bas, ondulée vers le haut (L2).
n. Sable blanc avec lentilles de marne blanche et lits de lignite, bancs de
grès blanc mamelonné à végétaux et bois silicifiés, au sommet (L2).


Fig. 4. - COUPE-DIAGRAMME ENTRE JAUCHE, S.-E. LANDEN ET LOOZ, MONTRANT
NETTEMENT LA VALLEE DU FLEUVE LANDENIEN SUPERIEUR CREUSEE AU
TRAVERS DES DEPOTS DU LANDENIEN INFERIEUR ET ETABLISSANT SON FOND
SUR LE TERRAIN CRETACE.

P. Terrain primaire.
C. Terrain crétacé.
H. Etage heersien.
a. Gravier de base du Landenien inférieur (L1a).
b. Sable d'immersion marine (L1b).
c. Sable argileux plus ou moins durci (L1c).
d. Sable d'émersion marine (L1d).
m. Gravier épais, dédoublé, avec sable grossiers et graveleux, base du
Landenien supérieur (L2), surmonté de sables grossiers obliquement
stratifiés.
n. Sable à allure ondulée avec lits d'argile et de lignite.

Toutefois, dans ce dernier cas, le sable d'émersion L1d n'est plus visible
et l'on reconnâit que l'ensemble de ce qu'on appelle Landenien supérieur
repose directement sur le dépôt marin de fon L1c, que l'on reconnaît être
énergiquement raviné, à tel point, parfois, que le gravier de base de L2
est rempli de fragments roulés de grès argileux glauconifères L1c.

Une coupe Perwez-Landen-Saint-Trond, dirigée Sud-Ouest-Nord-Est au travers
du courant fluvial landenien à son embouchure, donne donc l'allure repro-
duite à la figure 2.

Au sommet, on trouve des sables blancs, des bancs de grès blanc mamelonnés
à végétaux, des lits de lignite plus ou moins purs, plus des bois sili-
cifiés, etc.

Les termes m et n donnent bien l'échelle stratigraphique complète de ce que
l'on appelle communément "Landenien supérieur" (L2).

La coupe Perwez-Landen-Saint-Trond a été choisie parce qu'elle correspond à
la position moyenne du débouché du fleuve landenien dans la mer, là où le
courant avait encore la force d'amener des cailloux dans le thalweg.

Si l'on se reporte plus au Nord-Ouest, c'est-à-dire si l'on étudie la coupe
Wavre-Tirlemont-Leau, parallèle à la première, mais passé l'embouchure,
c'est-à-dire vers le large, tous les caractères accentués que nous venons
d'indiquer s'atténuent et le diagramme prend l'aspect que l'on peut remar-
quer à la figure 3.

Ici, les sables L2 ne ravinent plus sensiblement le terme L1c, ils se
développent simplement au détriment du sable d'émersion L1d, et la limite
entre L1 et L2 devient imprécise et très difficile à tracer.

Si, au contraire, nous traçons une coupe au sud-Est de celle de Perwez-
Landen-Saint-Trond, partant par exemple de Folx-les-Caves ou de Jauche et
passant au Sud-Est de Landen, l'allure générale se modifie encore sensi-
blement, ainsi que l'indique la figure 4.

Nous nous trouvons alors en travers du plein courant fluvial, là où se
voient le mieux les effets de l'érosion.

Au Sud-Est d'Orsmael, à 5 kilomètres au Nord de Landen, j'ai recueilli,
dans le gravier de base du Landenien supérieur, ravinant énergiquement L1c,
la faune de vertébrés suivante, déterminée par L.L.Dollo :

MAMMIFÈRES.

Plesiadapis sp. Lemoine. Pachynolophus Maldani Lemoine.
Protoadapis sp. Lemoine. Protoproviverra (?) sp. Lemoine.
Dectiadapis sp. Lemoine. Forme inédite sp.
Hyracotherhyus sp. Lemoine.

REPTILES.

Crocodiliens. Platemys (Chélonien).
Varan. Ophidien ?

POISSONS.

Lepidosteus.

Eléments remaniés du Landenien inférieur.

Odontospis macrota Ag.
Odontospis rutoti Wink
Odontospis cuspidata Ag.

C'est bien là la faune du conglomérat de Cernay.

Tout ces ensemble de faits que nous avons si bien et si longuement étudiés
à l'embouchure du fleuve landenien de Hesbaye, nous le retrouvons à la
frontière Sud du Hainaut, mais sur une plus large échelle.

Vers Erquelinnes, nous sommes dans une position en tout semblable à celle
comprise entre Perwez et Landen, c'est-à-dire que nous nous trouvons à
l'intérieur du delta, vers la rive gauche.

Ici, comme aux environs de Landen, nous voyons les sédiments du fleuve
landenien, avec important cailloutis à la base, ravinant énergiquement le
Landenien inférieur, avec faune contemporaine d'Orsmael et de Cernay.

A Grand-Reng, où nous sommes au Nord d'Erquelinnes, nous avons tout lieu de
croire que le Landenien supérieur, au moins aussi épais que l'ensemble du
Sparnacien, en France, peut l'être en maints endroits, a entièrement raviné
le Landenien inférieur marin et repose directement sur la carie.

Plus vers le Nord-Est, vers Binche, le fait devient évident; le Landenien
supérieur, à base très caillouteuse, après avoir entièrement raviné
l'Eocène inférieur, repose directement sur le Crétacé et parfois même sur
le Primaire.

Pour ce qui concerne le delta landenien du Hainaut, la ville de Binche est
située à peu près dans la même position médiane que Landen et Hesbaye et,
en effet, lorsque l'on continue vers le Nord et le Nord-Est, on voit le
Crétacé réapparaître sous le Landenien supérieur, puis successivement tous
les termes du Landenien inférieur marin, à mesure que le facies fluvial
s'atténue, puis disparaît.

Le delta d'Erquelinnes était non seulement environ trois fois plus large
que celui de Landen, mais le débit des eaux douces était dès lors en pro-
portion.

Aussi, alors que s'éloigner le 1 ou 2 kilomètres soit vers le Nord-Ouest,
soit vers le Sud-Est de la ligne Perwez-Landen-Saint-Trond suffit pour nous
montrer des allures fort différentes dans la coupe du delta de la Hesbaye,
ici l'effet moyen d'érosion que l'on constate sur la ligne Erquelinnes-
Binche-Haine-Saint-Pierre se reproduit jusque passé 6 kilomètres à l'Ouest
de Binche, car, dans la tranchée du chemin de fer située à l'Est de la
halte de Villereille-le-Sec, et dans de petites sablières voisines, on peut
encore constater l'existence du ravinement de la craie blanche par les
sédiments fluviaux, alors qu'au Sud, vers Aulnoye, et au Nord, à Villers-
Saint-Ghislain, les dépôts marins du Landenien inférieur, analogues à ceux
de la coupe Wavre-Tirlemont-Léau, apparaissent, tandis que si l'on recule
vers le Sud-Est de Binche, ce sont les facies continentaux comme ceux de la
coupe Jauche-Looz qui se montrent.

On sait en effet, par le levé de la Carte géologique, que l'Entre-Sambre-
et-Meuse ne renferme guère que des sédiments fluviaux du Landenien supér-
ieur, reposant directement sur le Primaire.

Par cet ensemble considérable de faits, M. Rutot estime qu'il a démontré non
seulement l'existence de l'embouchure de deux fleuves ou de deux bras
distincts d'un même fleuve le long du rivage Sud-Est de la mer landenienne,
mais encore que ces fleuves, qui ont suivi la mer en retraite pendant
l'émersion marine, sont venus troubler le dépôt marin normal d'émersion, le
sable L1d, soit en se mélangeant, soit même en se substituant à lui, et dès
lors il est tout naturel que les deltal ayant avancé vers l'Ouest à mesure
que la mer landenienne se retirait, le courant fluvial proprement dit ait
creusé son chenal profond d'abord au travers des facies marins jusqu'à
venir reposer directement soit sur le Crétacé, soit sur le Primaire.

Et voilà comme quoi M. Rutot ne reconnaît pas, au point de vue scientifique
strict, l'existence d'un terme landenien supérieur, celui-ci étant absolu-
ment contemporain du sable marin d'émersion L1d, dont il ne constitue que
le facies d'eau douce.

Mais là ne sont pas les seuls dépôts landeniens existant en Belgique.
En effet, la mer du Landenien inférieur ne s'étendait pas indéfiniment vers
le Nord-Ouest, car, dans la région Nord-Ouest de notre pays, nous consta-
tions que le Landenien marin bien caractérisé ne s'avance guère au delà de
la Lys, et que de ce côté la mer était bordée par une côte basse, lagunai-
re, où des alternatives d'influences marines et d'eau douce ont causé
l'établissmeent d'un régime saumâtre très nettement caractérisé, paraissant
se rattacher directement au Sparnacien français et au Woolwich and Reading
beds du bassin de Londres.

Ce facies particulier du Landenien n'est nulle part accessible à l'obser-
vation directe, mais un bon nombre de sondages profonds de la Flandre l'ont
traversé, et l'on possède à son sujet de renseignements satisfaisants.
Un examen des très nombreux grands sondages effectués dans les deux Flan-
dres montre que le Landenien normal, constitué par ses quartre termes:
gravier de base L1a, sable d'immersion L1b, sable argileux de fond L1c et
sable d'émersion L1d, existe partout dans la région de Renaix et de Flo-
becq, de Ninove, d'Alost, de Grammont, d'Audenarde, de Wetteren, de Dottig-
nies, d'Estaimbourg, de Mouscron, de Menin et de Courtrai.

Selon les points observés, les divers termes sont plus ou moins bien
représentés, parce que, par exemple, dans la région de Grammont, Ninove et
Audenarde, il existe un haut fond de roches primaires, ce qui a empêché le
sédiment argileux L1c, caractérisant la profondeur, de se déposer.
Mais le facies général est bien marin.

Le facies sparnacien du Landenien a été rencontré plus ou moins nettement
dans les puits artésiens de Bailleul, Roulers, Lichtervelde, Beernem,
Ostende, Blankenberghe, Mariakerke lez-Gand et Gand, et encore, dans un
certain nombre de cas, à Gand, à Ostende et Bailleul, par exemple, la
partie inférieure des dépôts paraît marine après avoir été poldérienne
à la base.

Il semble donc que pendant l'immersion landenienne (L1a,L1b), la région
basse du Nord-Ouest de la Flandre, c'est-à-dire celle comprise au Nord
d'une ligne passant au Sud de Bailleul, entre Ypres et Werwicq, entre
Iseghem et Courtrai, à Deynze, au Sud et à l'Est de Gand, a été soumise à
un régime poldérien. (Dépôt d'argile plastique).

Pendant la période d'immersion marine, alors que vers le centre de la
Belgique le dépôt de fond L1c s'étalait, le sol de la région basse du Nord-
Ouest s'était légèrement affaissé; ce qui avait permis à la mer de déposer,
sur les argiles poldériennes, une couche de sable vert, glauconifère.

Ce n'est que lors de l'émersion, pendant le dépôt du sable d'émersion L1d
et de son facies fluvial et d'estuaire L2, que le facies sparnacien s'est
développé dans la Flandre .

Le soulèvement qui mit fin au Landenien s'étant produit à la fois sur tout
notre territoire, la région basse se releva assez pour permettre, grâce à
des apports d'eau douce venant de l'Ouest-Nord-Ouest, l'établissement du
régime d'eau saumâtre si bien caractérisé paléontologiquement et litholo-
giquement.

Voici la liste des espèces recueillies à Ostende, à Beernem et à Gand, dans
le facies sparnacien du Landenien:

POISSON.

Odontaspis macrota Ag.

GASTROPODES.

Tritonidea lata Sow. Faunus curvicostatus Desh.
Turritella sp. Melania inguinata Def.
Potamides funatus Mant. Stenotyra miliola Mell.
Melanopsis buccinoidea Fer.


LAMELLIBRANCHES.

Unio gandevensis Leriche. Cyrena cardioides Desh.
Unio aff. Wateleti Desh. Ostrea sparnacensis Def.
Unio sp. Ostrea bellovacensis Lmk.
Cyrena cuneiformis Fer. Ostrea suessoniensis Desh.
Cyrena sp. Corbula Arnouldi Nyst.

SPONGIAIRE.

Cliona erodens Dollfus.

De tout ce qui vient d'être dit, je conclus que le Landenien de Belgique
est constitué stratigrapniquement comme suit:

Etage landenien de Belgique.

Phases REGION N.-O. REGION MEDIANE REGION S.-E.
de l'oscillation (Flandre) (Hainaut-Brabant) (Hesbaye-Entre-
du sol Sambre-et-Meuse)

Phase Facies saumâtre Sable marin Facies sparnacien
d'émersion ou sparnacien, d'émersion (L1d) fluvial et fluvio-
à faune saumâtre à faune marine marin de delta,
dit "Landenien
supérieur" (L2), à
faune d'eau douce.

Phase Sable argileux et argile sableuse,
d'affaissement Sable marin glauconifères, fossilifères. Tuffeau
maximum. de Chercq. Tuffeau de Lincent (L1c),
à faune marine.

Sable très glauconifère d'immersion.
Tuffeau d'Angres (L1b)
Phase Argile grise Gravier de base (silex verdis et
d'immersion poldérienne cailloux roulés de roches diverses)
(L1a).
Faune marine.


Ce tableau résume et précise les conclusions de M. Rutot à la suite de son
étude monographique du Landenien de Belgique.


Opinion de M. G.Dolfus.

M. G.Dollfus, se rapportant à ce que nous avons vu dans le Nord de la
France, insiste pour rappeler la netteté des superpositions dans l'Eocène
inférieur.

On y voit, à la base, un série marine commençant par un cailloutis de silex
verdis, surmonté d'un sable argileux plus ou moins durci, souvent très
glauconifère, dont l'un des facies est le tuffeau de La Fère et l'autre les
sables de Bracheux, recouverts à leur tour par une très puissante masse de
sable régulièrement stratifié, à faune marine, dont le facies le mieux
caractérisé a reçu le nomde sables de Châlons-sur-Vesles. Au sommet, cette
masse peut perdre sa glauconie et se durcir en grès blancs (grès de Lanis-
court).

Au-dessus de la série marine, qui a reçu le nom de Thanetien, se développe
une série à éléments lithologiques hétérogènes, mais dont la faune est
saumâtre.

Cette série moyenne commence souvent par un gravier de base (conglomérat de
Cernay, poudingue, de Versigny et de Monceau-les-Leups), au-dessus duquel
apparaissent de l'argile plastique plus ou moins épaisse, puis des altern-
ances de sables très fossilifères ou faluns et l'argile parfois très lig-
niteuse.

Vers le haut apparaissent des sables blancs, purs, avec banc subcontinu de
grosses concrétions gréseuses, à surface mamelonnée et à végétaux, dit
"grès de chaillevois", utilisé comme pierre à pavés. Le sable qui entoure
le banc de grès renferme de nombreux fragments de bois silicifié.

Enfin, la série moyenne, ou des lignites, se termine vers le haut par
l'ensemble des sables graveleux de Sinceny, à faune saumâtre, à peu près
identique à celle des lignites sous-jacents.

C'est à l'ensemble de la série moyenne, d'eau saumâtre, que l'on a donné le
nom de Sparnacien.

Immédiatement au-dessus des couches caillouteuses de Sinceny commence la
série supérieure marine, comprenant les sables de Cuise et les horizons
supérieurs, tels que l'argile verte glauconifère du Laonnais, rapportée par
M. Gosselet - à juste titre et de l'avis général - au Paniselien des géo-
logues belges.

Cet ensemble marin supérieur a reçu, en France, le nom d'Ypresien.

D'après M. G.Dolfus, des divisions semblables se rencontrent dans le bassin
de Londres.

A la base se montre la série marine des sables de Thanet, d'où le nom de
Thanetien, donné au groupe marin inférieur.

Au-dessus se montre la série saumâtre, avec lignites, dite Woolwich and
Reading beds, surmontée de la couche caillouteuse d'Oldhaven, qui se rac-
corde si bien aux sables de Sinceny. Cet ensemble représente absolument le
Sparnacien.

Enfin, au-dessus se développe le London clay, qui se synchronise à
l'Yprésien des géologuques français.

Dans ce qu'il constate aux environ d'Erquelinnes, M. G.Dolfus reconnait
l'existence des trois mêmes groupes dans le Landenien inférieur marin des
géologues belges, ou Thanetien, dans le Landenien supérieur, ou Sparnacien,
dans les argiles d'Ypres, ou Ypresien.

Eu égard à ces analogies, que tout le monde doit reconnaître, il propose
aux géologues belges d'abandonner les noms de Landenien inférieur et de
Landenien supérieur, pour adopter les noms proposés par les géologues
français, c'est-à-dire Thanetien et Sparnacien, ce dernier ayant plus
d'aflinité avec l'Ypresien qu'avec le Thanetien.

Malgré toutes les raisons données par M. G.Dollfus pour soutenir sa thèse,
M. A.Rutot se voit dans l'impossibilité de l'accepter pour ce qui le con-
cerne personnellement.

Et d'abord, on peut remarquer que le programme de l'excursion a été élaboré
de manière à visiter trois grandes coupes en marchant de l'Est vers
l'Ouest.

Or, ce que M. Dollfus voit si bien et si clairement aux environs d'Erquelin-
nes et verra cet après-midi dans les environs de Leval-Trahegnies, il
n'aura plus l'occasion de le revoir dans la suite.

Cette subdivision nette en trois groupes est donc un fait local qui ne peut
se constater que lorsque l'on se trouve dans les deltas des ou du fleuve
landenien, soit aux environs d'Erquelinnes, soit aux environs de Landen; ou
bien aussi vers le Nord-Ouest du pays, où apparaît le facies sparnacien
saumâtre.

Partout, dans le bassin landenien, où les choses se sont passées normale-
ment, où le cycle sédimentaire complet et pu se déposer sans perturbations
causées par des apports fluviaux, les masses se réduisent à deux, toutes
deux marines: le Thanetien et l'Ypresien, avec disparition complète du
Sparnacien, et sans qu'on puisse démontrer qu'il existe une lacune sensible
entre les deux masses.

Malgré son importance apparente en Franbce et dans le bassin de Paris, le
Sparnacien n'est, comme en Belgique, qu'une manifestation secondaire,
d'ordre inférieur, qui doit se rattacher à une période d'impotance primaire
et par conséquent marine: thanetienne ou ypresienne.

Or, pour ce qui concerne la Belgique, M. Rutot estime avoir démontré que
ce que l'on appelle le "Landenien supérieur" est une manifestation
LANDENIENNE, c'est-à-dire thanetienne d'ordre secondaire.


Toute la question réside donc actuellement dans ceci:

Le landenien superieur de Belgique est-il bien réellement l'exact équiva-
lent du Sparnacien français ?

Pour répondre à cette question, il y a lieu de peser les différences et les
ressemblances.

Pour autant qu'il a pu en juges d'après la course rapide effectuée dans le
Nord du bassin de Paris, il semble à M. Rutot que le Sparnacien paraît
surmonter toujours les sables de Châlons-sur-Vesles ou leurs représentants,
au lieu de s'y mêler ou de s'y substituer peu à peu latéralement.
C'est là une différence avec ce qui se passe en Belgique, où M. Rutot démon-
tre que le Landenien supérieur n'est qu'un facieds local du sable d'émer-
sion marin L1d, qui est bien l'exact représentant des sables de Châlons-
sur-Vesles.

En Belgique, en deux points du bassin landenien marin, le facies fluvial ou
fluvio-marin du Landenien supérieur vient remplacer en tout ou en partie le
dépôt normal de l'émersion marine, ou s'y substituer dès que le facies
fluvial pur est clairement développé.

D'autre part, le Sparnacien français est criblé de mollusques d'eau
saumâtre, tandis que le Landenien supérieur de la région Est de la Belgique
n'en renferme pas.

A ces deux faits, on pourra peut-être en ajouter un troisieme, si l'on ne
se rapporte qu'à ce que l'on verra dans le cours de cette très courte
excursion: c'est que le Landenien supérieur de Belgique n'a pas exactement
la même constitution lithologique que le Sparnacien français.

Dans la discussion de ces trois points relatifs aux différences, nous
parlerons aussi des ressemblances.

Pour ce qui concerne le premier point: superposition constante, en France,
du Sparnacien au Thanetien complet (c'est-à-dire muni de son sable d'émer-
sion-, nous serions assez tentés de croire que c'est parce que nous n'avons
pu tout voir qu'il peut paraître en être ainsi.

Cependant, si nous analysons ce qui a été vu, nous remarquons que les
coupes observées peuvent se diviser en deux groupes: 1°un groupe de couches
où la superposition du Sparnacien sur le Thanetien s'opère nettement par
l'intermédiaire d'un gravier; 2° un groupe où la superposition a lieu par
passage insensible.

Pour ce qui concerne le premier groupe, les coupes de Monceau-les-Leups, de
Versigny (route de la Queue) et des environs de Reims (Cernay, Berru, etc.)
en montrent des représentantq magnifiques.

Pour ce qui concerne le deuxième groupe, les coupes de la Montagne de Laon
sont non moins significatives.

Or, il semble à M. Rutot que le premier groupe de coupes concorde absolument
avec celles des environs d'Erquelinnes et de Landen, où le Landenien supér-
ieure ravine plus pou moins énergiquement le Landenien inférieur. Des deux
côtés, le Landenien inférieur ou Thanetien peut même être complètement
raviné, comme à Bray et au Sud de Landen d'une part, comme à Cernay lez-
Reims de l'autre.

D'autre part, en Belgique, surtout dans le delta de la Hesbaye, il existe
des coupes où le Landenien inférieur (sable d'émersion L1d) passe au Lan-
denien supérieur par une transition aussi insensible que celle du représen-
tant des sables de Châlons-sur-Vesles passant au Sparnacien à la Montagne
de Laon.

De l'avis de M. Rutot, le géologue qui ferait un lévé géologique détaillé
de la région comprise entre Chauny et Reims pourrait établir des coupes
parallèles reproduisant absolument l'aspect de celles que M. Rutot a pu
dresser dans le Hainaut et dans la Hesbaye et dont il a fourni ci-dessus
l'allur schématique.

La prétendue différence signalée vient donc, semble-t-il, se transformer
plutôt en ressemblance.

Pour ce qui concerne le second point: la présence d'une masse énorme de
fossiles dans le Sparnacien et l'absence de fossiles dans le Landenien
supérieur, il y a lieu de faire les remarques suivantes:

Cestes le Landenien supérieur de Belgique est dépourvu des nombreux Ga-
stropodes et Lamellibranches du Sparnacien, mais il n'est toutefois pas
complètement dépourvu de fossiles.

Comme preuve, rappelons les listes données ci-dessus, des fossiles
vertébrés du gravier E d'Erquelinnes et du gravier d'Orsmael.

Or, cete faune de vertébrés vaut bien la faune des mollusques et elle est
bien celle du conglomérat de Cernay, c'est-à-dire de la base du Sparnacien.

Il est, du reste, à remarquer que tous les affleurements belges du Lande-
nien supérieur sont situés à assez grande altitude, notablement au-dessus
des niveaux d'eau constants. Comme ces affleurements sont surtout sableux,
c'est-à-dire perméables, les eaux météoriques d'infiltration ont eu tôt
fait d'avoir dissous tous les fossiles à test calcaire, d'où leur dispari-
tion.

De toute façon, M. Rutot est d'avis que si les mollusques du Landenien
supérieur avaient été conservés, ils appartiendraient à une faune saumâtre
avec mélange de coquilles d'eau douce.

D'ailleurs, le facies landenien supérieur de la Flandre, placé, au con-
traire, à grande profondeur sous le sol, dans des couches baignées par le
niveau d'eau, à conservé ses fossiles, qui sont ceux du sparnacien des
bassins de Paris et de Londres.

Enfin, vient le troisième point: Le Landenien supérieur de Belgique est-il
réellement aussi différent, lithologiquement, du Sparnacien français qu'on
pourrait le croire ?

A cette question, M. A.Rutot, qui a étudié monographiquement le Landenien
belge, se croit à même de répondre en toute connaissance de cause.

On ne peut juger en rien de ce qu'est, en général, le Landenien supérieur
belge au seul examen des sablières d'Erquelinnes et de Grand-Reng.

Ici, l'impression ressentie permet de croire que la grande masse du Lande-
nien supérieur est partout constituée de sable grossier, avec lentilles de
marne à la partie supérieure.

Mais cette impression est très incomplète et due simplement au fait que,
d'une part, nous sommes ici en plein courant fluvial, et, d'autre part, que
seuls les sables sont recherchés pour l'industrie.

On conçoit que, lorsqu'en ouvrant une sablière, les exploitants s'aperçoi-
vent qu'ils entrent dans les couches argileuses et ligniteuses, ils s'em-
pressent d'abandonner le travail.

Du reste, ces couches ligniteuses ne se présentent jamais dans le plein
courant fluvial; elles existent des deux côtés du courant, ou bien elles se
montrent là où le delta s'est fort élargi et où la vitesse des eaux s'est
considérablement réduite. De toute façon, les lignites ne se montrent guère
que tout au sommet du Landenien supérieur, ils sont de l'époque où le
courant d'eau était fortement étalé, les chenaux ayant été comblés de
sédiments sableux.

L'exploration du delta d'Erquelinnes n'a, d'ailleurs, guère montré de
facies présentant de grandes ressemblances avec celui observé dans la
cendrière de Chaillevois, par exemple.

C'est dans le delta de la Hesbaye, où le temps trop court réservé à l'ex-
cursion ne nous permettra pas d'aller, que le facies de Chaillevois se
montre plus communément; j'en ai signalé plusieurs coupes dans l'Explica-
tion de la Feuille de Landen accompagnant la Carte féologique publiée à
l'échelle du 1/20.000.

J'en connais encore d'autres vers le Nord de la feuille de Tirlemont, etc.
Toutefois, il est incontestable que le facies ligniteux et falunien ex-
ploité à Chaillevois pour la fabrication de l'alun est plutôt l'exception
en Belgique; mais, en revanche, certaines autres ressamblances sont frap-
pantes au point qu'on en est impressionné.

Tout le sommet de l'exploitation de chaillevois, c'est-à-dire les couches
visibles au-dessus des argiles à lignites proprement dites, reproduit
tellement fidèlement le sommet de notre Landenien supérieur de la Hesbaye
qu'il est impossible que nous ne soyons pas en présence, des deux côtés,
d'un même niveau.

Aux environs de Tirlemont, on peut observer, avec le facies de l'argile à
lignite très atténué, toute la série vue au sommet de l'exploitation de
Chaillevois, et tous les géologues belges présents à l'excursion ont cer-
tifié et insisté sur l'idendité de ce qu'ils avaient sous les yeux avec ce
que l'on peut observer entre Oirbeek et Overlaer, au Sud-Ouest de Tirlemont
(1).

(1) Voir la coupe figurée dans mon travail iniulé: Note sur la limite
orientale de l'étage ypresien dans le Nord-est de la Belgique, suivie
de considérations hydrologiques découlant de la connaissance de
l'étendue du bassin ypresien. (BULL. DE LA SOC. BELGE DE GEOL., DE
PALEONTOL., ET D'HYDROL. t.II. 1888.)

On y voit, sous des couches quaternaires, tongriennes, bruxelliennes et
ypresiennes:

4. Lit de gros fragments de bois silicifié reposant sur de
fines alternances de lignite noir et de sable blanc 0m30 à 0m50
3. Lit de sable blanc, pur, ou pointillé de lignite 0,20
2. Banc de grès blanc exploité comme pierre à pavés 1,00 à 1,50
1. Sable blanc, meuble, passant vers le bas, insensiblement,
au sable glauconifère d'émersion L1d, visible sur 1,00

Bref, le Landenien supérieur de Belgique offre comme une réduction du
Sparnacien de France; il commence de même, soit par un gravier ravinant,
soit par transition aux dépôts marins sous-jacents; il renferme, d'une
manière atténuée, des couches médianes analogues aux argiles à lignites et
il se termine au sommet par un banc très bien connu de grès blanc à surface
mamelonnée, utilisé à la fabrication de pavés, et renfermant des débris
végétaux et notamment des traces verticales de racines. Ce banc est surm-
onté de sable avec lignite et nombreux gros fragments de bois silicifié.

En présence de ces analogies, pour ne pas dire plus, M. Rutot est d'avis que
le Landenien supérieur de Belgique est l'équivalent exact du Sparnacien.
Cela étant, nous voici devant l'opinion exprimée par M. Dollfus et devant sa
proposition.

Répétons qur M. Dollfus et les géologues français séparent nettement le
Sparnacien du Thanetien, et qu'ils tendent plutôt à rapprocher le premier
de l'Ypresien que du Thanetien. Ils proposent donc aux géologues belges de
supprimer le terme Landenien supérieur pour le remplacer par celui de
Sparnacien

En présence du résultat de ses études sur le Landenien de Belgique,
M. Rutot ne peut accepter ni l'avis de M. Dollfus, ni sa proposition.
L'étude monographique du Landenien de Belgique a permis à M. Rutot de
conclure:

1° Que l'étage landenien est une unité stratigraphique aussi bien définie
qu'il est possible;

2° Que l'étage landenien correspond exactement à une oscillation du sol,
comprenant une phase d'affaissement avec immersion marine, suivie d'une
phase de soulèvement avec émersion marine;

3° Qu'en fait, les observations démontrent que pendant ces deux phases, il
s'est déposé, dans le bassin landenien, un cycle sédimentaire marin
complet et normal, comprenant:

L1d. Sable d'émersion.
L1c. Sable argileux de fond.
L1b. Sable d'immersion
L1a. Gravier de base;

4° Qu'à côté de ce fait général vient se placer un fait local et
particulier: le débouché sur le rivage sud-Est de deux cours d'eau qui
se fait vivement sentir pendant la phase d'émersion seule, parce que
ces cours d'eau, devant suivre la mer en retraite, sont venus troubler
localement de dépôt du sable d'émersion L1d et, en plein courant,
substituer des sédiments fluviaux aux sédiments marins;

5° Qu'en conséquence, les dépôts d'eau douce, dits "Landenien supérieur",
sont contemporains de la phase d'émersion de l'oscillation landenienne
et, stratigraphiquement, ne sont qu'une dépendance immédiate de l'étage
landenien;

6° Qu'en revanche, ces dépôts dits "Landenien supérieur" n'ont rien de
commun avec les dépôts marins ypresiens qui les recouvrent
immédiatement.

M. Rutot ne voit aucune raison sérieuse empêchant d'appliquer ces conclusi-
ons aux couches observées en France, tant les analogies sont frappantes.

Le tableau de la page suivante indique, d'après l'orateur, la concordance
telle qu'il l'établit personnellement, là où les couches sont les mieux
limitées et caractérisées.

D'après ce tableau, le Sparnacien, loin de constituer un étage distinct et
d'imposer son nom au Landenien supérieur, deviendrait simplement, comme
celui-ci, un facies de la partie supérieure du Thanetien.

L'auteur ne se fait nulle illusion sur l'effet immédiat que produira cette
conclusion sur ses confrères français; il croit cependant devoir émettre
pour terminer les quelques considérations suivantes:

Bien que des analogies frappantes aient été reconnues entre les bassins,
y a-t-il identité complète?

Non, mais les différences que l'on peut constater ne sont pas d'ordre
primordial, elles sont d'ordre secondaire.

M. Rutot ne voit, entre le bassin français et le bassin belge, que des
différences de conditions localisées, qui peuvent se résumer comme suit:

1° En Belgique, l'oscilation landenienne a été nette, bien caractérisée
et complète;

2° En France, l'oscillation thanetienne, tout en ayant été plus vaste
comme étendue, a été moins ample et le noyau argileux médian du cycle
sédimentaire est peu accusé;

3° En Belgique, l'émersion landenienne s'est nettement traduite par le
dépôt d'un sable d'émersion et par un retrait évident du rivage marin;

4° En France, l'émersion a été très lente et insuffisante et les sables de
Châlons-sur-Vesles, au lieu de représenter seulement le sable d'émersion
de Belgique, occupent au moins la moitié de l'ensemble des dépôts
marins;

5° En Belgique, à peine le retrait de la mer landenienne a-t-il commencé,
que deux cours d'eau, dont l'effet s'était à peine fait sentir durant
la première phase, creusement des chenaux au travers des couches
précédemment déposées, pour suivre la mer dans son mouvement de
retraite.

Essai de synchronisme entre l'étage landenien de Belgique et le Sparnacien
et la Thanetien du Nord de la France, par M. A.RUTOT


BELGIQUE
DEPOTS DE DELTA DEPOTS MARINS
N.-O. de la Flandre Hainaut et Brabant
Argile ypresienne.
Sable caillouteux Lacune? Lacune?
à faune sparnacienne

Sable blanc ligniteux
avec banc de grès blanc
et bois silicifié.
Sables, argiles et Alternances de sable, de Sable marin d'émersion L1d
lignite, à faune marne, d'argile et de
sparnacienne. lignite.
Sables grossiers et
gravier de base à
ossements de vertébrés.

Argile sableuse plus ou
Sable glauconifère. moins durcie, tuffeau L1c.
Sable d'immersion L1b.
Argile poldérienne. Gravier de base L1a.


NORD DE LA FRANCE.
DEPOTS DE DELTA DEPOTS MARINS
Sables de Cuise
Sables caillouteux de
Sinceny.

Sable blanc ligniteux avec
banc de grès blanc et bois
silicifié
Alternances de sable, de marne,
d'argile et de lignite, avec faune Sables de Châlons-sur-
saumâtre, Vesles
Sable grossiers et gravier de base
à ossements de vertébrés.
Sabe et calcaire de Rilly.

Sables de Bracheux, tuffeau
sables glauconifères.

Gravier de base.


Les sédiments de ces cours d'eau sont surtout sableux en Belgique, ce qui
est l'indice d'une grande vitesse des eaux, due au soulèvement de la région
Sud-Est du pays, direction d'où venaient ces cours d'eau;

6° En france, le bassin marin peu soulevé se vide avec difficulté. Un
fleuve tranquille qui se jetait d'abord au Sud du bassin y apporte
maintenant des eaux plus volumineuses et troubles.
Les eaux douces se mêlent aux eaux marines, et dans le précédent bassin
marin s'établit un régime d'eau saumâtre où des sédiments hétérogènes,
mais surtout argileux, se déposent avec des débris de végétaux charriés
ou croissant sur des îlots temporaires.
Le fait du déversement du fleuve dans l'énorme bassin amène une perte
de vitesse immédiate des eaux, ce qui favorise de dépôt des argiles;

7° En Belgique, ce sont les phases d'immersion, puis de tranquillité, qui
paraissent avoir été les plus longues, tandis que la phase d'émersion
samble avoir été plus courte;

8° En France, la phase d'immersion semble avoir été la plus courte, tandis
que la phase d'émersion doit avoir été la plus longue.
Le facies saumâtre sparnacien peut donc avoir commencé en France
sensiblement plus tôt que le facies fluvial de Belgique; il a pu durer
aussi plus longtemps;

9° Le facies de Sinceny ne semble avoir d'équivalent, en Belgique,
que dans le Nord-Ouest de la Flandre, où les couches à facies
sparnacien sont surmontées de lits sableux et caillouteux;

10° En France, le facies supérieur de Sinceny semble concorder avec les
premiers effets de l'affaissement du sol qui a permis à la mer de
rentrer plus tard dans le bassin de Paris et d'y déposer les sables de
Cuise.
Ce serait comme la première manisfestation d'une rentrée des eaux
marines dans le vaste bassin lagunaire.
Cette interprétation pourrait amener les couches de Sinceny dans la
zone d'influence de l'Ypresien français;

11 En Belgique, les couches caillouteuses à facies de Sinceny ont pu jouer
le même rôle;

12 Malgré des indices contraires, il est impossible de dire si, en
Belgique, il existe une lacune plus ou moins longue entre le sommet du
Landenien et la base de l'Ypresien.
Il se peut qu'une lacune existe, permettant en France la prolongation
de l'époque à facies sparnacien étendu, qui donne à celui-ci une
importance apparente plus grande qu'en Belgique.
Ce qui est certain, c'est que l'Ypresien, lorsqu'il ne repose pas, dans
notre pays, sur des couches caillouteuses à facies de Sinceny, ne
présente ni cailloux abondants ni ravinement à sa base.
Que l'Ypresien repose sur le sable marin d'émersion L1d ou sur les
dépôts fluviaux du facies dit "Landenien supérieur", - ce qui est rare,
- il débute toujours par une argile grise, plastique, sans fossiles
animaux, mais avec débris végétaux, qui paraît être plutôt une argile
poldérienne litorale qu'une argile de grand fond;

13° Rappelant enfin que nous avons vu, en France, des indices de
l'existence de modes très différents de contact entre le Sparnacien et
le Thanetien, qui rappellent singulièrement ce que M. Rutot a pu
observer en Belgique, celui-ci se permet de livrer les considérations
qui précèdent aux réflexions de ses confrères français, afin de les
engager à faire quelques nouvelles études et vérifications qui
pourraient peut-être quelque peu modifier la manière de voir actuelle.

M. Dollfus est loin de critiquer d'une manière générale la théorie du cycle
sédimentaire préconisée par MM. Rutot et Van den Broeck, mais il tient à
faire observer combien elle est souvent d'application délicate.

Ainsi on a vu à Erquelinnes comme à Mons, dans le Landenien, des graviers
dont M. Rutot a déclaré ne devoir tenir aucun compte, tandis que, dans les
mêmes localités, les graviers de base font défaut entre deux systèmes
importants, entre le Landenien et l'Ypresien. Si l'on s'en rapportait aux
graviers importants, la limite à tracer serait entre le Landenien inférieur
et la Landenien supérieur, et leur absence conduirait à réunir le Landenien
supérieur à l'Ypresien, ce qui est justement la classification proposée par
M. Dollfus. Le sable d'émersion L1d est franchement marin, il est séparé
par un profond ravinement du sable fluviatile ou fluvio-marin L2 et il ne
saurait en être synchronisé ni même rapproché. La classification
stratigraphique est basée sur l'oscillation des rivages, sur l'examen des
points comme Erquelinnes, Tirlemont et Landen, car dans les dépôts marins
profonds nous savons que la sédimentation est continue et que les forma-
tions peuvent passer de l'une à l'autre sans séparation. Les coupes mêmes
de M. Rutot montrent à l'évidence qu'il y a une limite à tracer entre L1d
et L2.

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Ch.Stevens

2 (suite)

Capitaine Ch.Stevens. - Ann. Soc. géol. de Bel. Liège, 1914, t.XLI,
(Mém.) p.8

FIG. 4. - Sablière b de la Société Merbes-le-Château, à Grand Reng
(au Sud de la route de Mons).

Même allure qu'à la sablière précédente:

4. Le quaternaire est moins épais 2.00
2. Le sable supérieur également 3.50
2 et 1. Le sable grossier se voit sur une hauteur de 7.00


2bis (suite)

Ibid, p.7.

FIG. 3. - Sablière a de la Station de Grand Reng (extrémité Nord).

Cette Sablière présente de haut en bas:

4. Limon ravinant le sable sous-jacent avec cailloutis à la
base: en moyenne 2.50
3. Sable jaunâtre, bariolé de zones verdâtres, avec lits
argileux ou marneux 4.50
2. Sable grossier à points noirs et à intercalations )
marneuses à stratification entrecroisée. )4.50
1. Sable plus grossier, graveleux.

Dans la même sablière, mais à 50 mètres plus au sud, l'exploitation permet
de voir le sable grossier à stratification entrecroisée sur une hauteur
d'environ 10 mètres.


2 et 2bis (suite)

Ibid, p.8.

Sablières a et b. - Ces sablières ne donnent pas lieu à des observations
nouvelles. On y reconnaît facilement les niveaux F, G, H et I de M. Rutot.
Le gravier E et les niveaux inférieur ne sont pas visibles.
Dans la sablière a, le sable fluvial se voit en un endroit sur une épais-
seur de 10 mètres, surmonté de 5 mètres de sable H et de 2,50 de limon. La
surface topographique étant à la cote 155, la base du sable fluvial doit
être recherchée à une cote inférieure à 138.

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G.TOUBEAU

2 (suite)

Ancienne sablière montrtant de haut en bas:

a) limon mélangé de sable roux 2m,
b) sables supérieurs: 3,5m;
c) sables argileux avec quelques lentilles d'argiles: 9 à 10m.


2bis (suite)

Coupe dans une très grande et très ancienne sablonnière et montrant
de haut en bas:

a) limon: 2m;
b) sables roux avec nombreuses lentilles argileuses vert-pâle (6m);
c) sables jaunes, pâles, à stratifications entrecroisées, avec points
noirs: 10m au moins.

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