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028W0303.TXT

PL. ANVERS 28 W. 

nos 301 - 302 - 303.

          Les Schijns et l'Escaut Primitifs à Anvers, par G. HASSE.
          (Extrait du Bull. Soc. Belge de Géologie, t.24 - 1910).

                                II.
          Etude géologique de la reconstitution du tracé des
                    anciens cours d'eau à Anvers.

            Les nouvaux bassins creusés au nord d'Anvers de 1902 à
          1907 ont permis une étude approfondie sur plus de 50
          hectares d'une nombreuse série de coupes géologiques
          intéressant d'anciens cours d'eau.
            J'entreprendrai tout d'abord l'etude détaillée de
          diverses coupes dans ces bassins dits intercalaires.
          (Planche XXI, nos 1 et 4 et fig.2)
            La première coupe que nous pouvons considérer comme
          type est celle prise sur une longueur de 125 mètres
          dans le sens transversal du courant (pl.XX, coupe AB,
          fig. 1 et pl. XXII).

               Fig. 1. - coupe AB de la planche XX.
          Voir photographie de la coupe de 125 mètres (pl.XXII).

            1. L'argile des polders se trouve en stratifications
          très régulièrement horizontales, déposée dans le
          polder de steenborgerweert depuis 1583, date des
          inondations défensives contre le prince de Parme; de
          nombreuses pièces de bronze à l'effigie de Philippe II
          roi des Pays-Bas, 1590 et 1592, ont été retrouvées dans
          l'argile au contact de la tourbe.
               L'argile a ici une faible épaisseur, parce que les
          inondations successives de ce polder en ont enléve une
          grande partie; dans d'autres polders, l'argile est
          beaucoup plus épaisse; mais partout elle a nivelé
          entièrement les anciens dépôts de cours d'eau au XVIe
          siècle après la réorganisation des polders et le
          creusement des nombreux canaux de dérivation des eaux.
            2. Couche compacte de tourbe, formée depuis la période
          néolithique jusqu'au XIe siècle, date à laquelle les
          forêts disparurent à cause des incessants ouragans et
          inondations du XIe siècle. Une hache en silex poli a
          été retrouvée dans la tourbe, au contact de l'argile
          verte sous-jacente.
               La couche de tourbe a une épaisseur variable pour
          différents points des polders, mais à Anvers, elle a au
          moins 30 centimètres d'épaisseur et se trouve disposée en
          une couche régulière, homogène, bien horizontale et
          constante.
            3. Dépôts fluviatiles argilo-limono-sableux à
          stratifications horizontales régulières, formés depuis
          le XIe siècle, date des premiers endiguements, jusqu'en
          1583.
               Ces dépôts sont extrêmement réguliers, horizontaux; les
          stratifications sont, ou bien régulièrement sablo-
          limoneuses alternées avec des parties argileuses, ou
          bien régulièrement limoneuses et toujours horizontales
          et se terminant en fuseau vers les rives. Aucun fossile
          arraché des rives dans les couches de limon, des
          mollusques fluviatiles assez fréquents, parfois un
          débris ou un objet intéressant une époque historique.
               Des poteries noires du XIe siècle furent retrouvées au
          contact des couches 3 et 4, puis de nombreux fonds de
          pots à pincées, des grès vernissés, des fragments de
          tuiles flamandes du XIIIe siècle, et vers l'argile des
          polders, des débris de poteries rouges bien vernissées
          du XVe siècle.
               Normalement, ces dépôts supérieurs se montrent
          stratifiés avec grande régularité; ils peuvent exister
          seuls dans une coupe et démontrent alors un bras de
          rivière qui s'est creusé à côté des autres vers le XIe
          siècle seulement.
            4. Dépôts fluviatiles sableux, blancs par décoloration,
          à stratifications irrégulières entrecroisées, formés
          depuis le IIIe-IVe siècle jusqu'au XIe siècle.
               Les sables de ces dépôts proviennent toujours des
          terrains en place dans les rives qui ont été érodés
          par l'action du courant; les mollusques fossiles y
          sont nombreux et y sont mêlés; on trouve des fossiles
          poederliens, scaldisiens, diestiens, miocènes,
          oligocènes, mêlés à des coquilles modernes fluviatiles,
          à des arbres entiers couchés dans les dépôts, à des
          végétaux en paquets, à des blocs de tourbe roulés,
          arrachés du banc de tourbe voisin.
               Les stratifications ne sont plus jamais horizontales
          dans ce dépôt et, d'après l'étude des dépôts, ces
          stratifications sont irrégulières, entrecroisées, non
          pas parce que le courant était violent, mais parce que,
          au dèbut de leur sédimentation, la marée est apparue
          dans les cours d'eau, poussant régulièrement deux fois
          par jour son flux, bouleversant le régime de
          sédimentation lente qui jusque-là avait été la règle
          (la coupe le montre), érodant les rives, arrachant
          aux terrains en place les sables et les fossiles et la
          tourbe. Il était tout naturel de retrouver mêlés, là où
          la coupe fut relevée et etudiée, les fossiles
          poederliens, scaldisiens et diestiens, mais étant donné
          l'orientation régulière des rivières et la
          connaissance de l'affleurement de ces divers terrains à
          Anvers, il était impossible d'expliquer la présence
          parmi eux des grands septarias de l'argile de Boom,
          des débris nombreux de Nautilus de l'argile de Boom,
          de Leda Deshayesiana, de Cardita Kickxii, des vertèbres
          oligocènes roulées d'Halitherium, des septarias perforés
          par Pholas et Saxicava provenant du contact du Miocène
          avec l'Oligocène.
               L'orientation des cours d'eau montre l'impossibilité
          de l'apport de ces matériaux de Boom à Anvers, et la
          seule hypothèse logique à admettre, c'est qu'au début
          du dépôt de ces sables, les débris ont été amenés de
          l'autre rive de l'Escaut, où l'argile de Boom et le
          Miocène affleurent, et que l'Escaut vers le IIIe siècle
          n'existait pas encore devant Anvers comme maintenant.
               L'ensemble formait un réseau inextricable de rivières
          enchevêtrées. D'ailleurs, on ne peut comprendre, dans
          une région comme celle d'Anvers, ou l'on n'a pu
          démontrer de véritables affaissements depuis le
          Néolithique dans les divers terrains, où la déclivité
          naturelle du sol est faible, des alternances de
          violence de courant qui seules expliqueraient ces
          variations dans la forme de stratification des
          sédiments. Si l'on devait invoquer un courant d'eau
          plus violent à une époque déterminée pour expliquer
          les stratifications entrecroisées, le fait d'avoir
          trouvé dans ces dépôts des débris fossiles venant de
          loin en aval et non de loin en amont suffirait pour
          répondre; aussi j'estime que la seule explication
          possible est celle de l'apparition de la marée à un
          moment donné dans ces anciennes rivières.
               Pourquoi la marée s'est-elle fait sentir aussi
          violemment vers les IIIe et IVe siècles dans ces cours
          d'eau, venant révolutionner toute leur organisation ? La
          question reste encore un problème; si la sédimentation
          est redevenue horizontale limoneuse au XIe siècle,
          l'explication en est facile : l'homme s'est mis à
          endiguer les polders, obligeant ainsi les eaux de marée
          à s'arrêter contre les vannes et les eaux d'amont à
          recommencer la sédimentation lente, horizontale et
          limoneuse.
               En ordre stratigraphique, nous retrouvons d'abord,
          au contact entre les couches 4 et 5, de nombreux
          ossements entaillés; puis des tuiles romaines, des
          meules romaines, des fragments de canalisation en
          poterie romaine, puis vers le contact entre les
          couches 3 et 4, des débris de poteries mal cuites, à
          pincées.
            5. Dépôts fluviatiles limono-sableux, à
          stratifications horizontales  régulières, avec coquilles
          d'eau douce, formés depuis
          le creusement des Schijns à l'époque initiale du
          Néolithique, jusque vers les IIIe et IVe siècles.





          Fig. 2. - RECONSTITUTION DU COURS DES SCHIJNS AU NORD D'ANVERS.

          Les parties en traits hachurés : cours reconstitué des
          Schijns. - Les parties en traits continus : cours d'eau
          encore existants. - Les parties en traits interrompus :
          contour du bassin et de l'enceinte d'Anvers de 1860. 
          - Les parties en traits continus de pointillés associés :
          enceinte de 1500. - Les traits droits coupant les
          parties hachurées indiquent les relevés de coupes
          géologiques.

          A, B, nouveaux bassins intercalaires. C, bassin America
          D, bassin Lefebvre. E, bassin Kattendijk. F, bassin aux
          bois. G, bassin Asia. H, bassin aux minerais. I. Grand
          bassin. J, Petit bassin.

          1, à l'angle vers l'Escaut dans le bassin D : point où
          ont été découvertes cinq barques en 1884. - 2, au
          bassin intercalaire A : une barque du xie siècle. - 3,
          au bassin intercalaire A : débris du VIIe siècle.



         
               En ordre stratigraphique, nous y retrouvons des
          ossements entaillés aux silex, des silex utilisés et
          taillés, un marteau en bois de cerf, des poids de
          de filets en grès bruxellien et enfin, au contact
          des couches 4 et 5, des ossements entaillés au silex
          et au métal.





                              Fig.4.

               Cette grande coupe fut prise entre les deux bassins
          intercalaires, au milieu, en AB (pl. XX et fig. 2,
          bassins AB).
               Certaines coupes ne montrent plus que les dépôts
          (n  3) les plus récents, par suite d'affouillements
          brusques; on retrouve alors sur le coté encore un
          peu de sable blanc mélangé avec des fossiles, des
          débris de tourbe, des pierres, et tout le dépôt ne
          forme qu'un ensemble homogène limoneux à
          stratifications très régulières (fig.4).
               Ou bien encore, toutes les couches géologiques
          subissent un bouleversement complet et se montrent
          dans une coupe mêlées et enchevêtrées (fig. 5 et 6).
               Ou bien encore, les dépôts les plus récents restent
          en place, les dépôts à stratifications entrecroisées
          se laissent affouiller et il s'y forme un mélange de
          diverses époques; les deux coupes ci-dessous
          (fig. 7) le démontrent fort bien : il s'agit d'une
          coupe au bassin Lefèvre, en un point ou furent
          retrouvées des embarcations des XIIe et XIIIe
          siècles.



          Fig. 5.- COUPE AU POINT D, Schéma de la photo fig. 6.



          Fig. 7. - A. POSITION INITIALE HYPOTHÉTIQUE, EN I-V
                    (FIG.2,D, DES CINQ BARQUES CONSIDÉRÉES. B.
                    POSITION OBSERVÉE, APRÈS LE REMANIEMENT DE 1421.


               Il peut encore se faire qu'au milieu des dépôts
          fluviatiles restés en place, se soit creusé un
          gouffre récent; ce cas fut admirablement démontré
          pour la découverte de la barque du XIe siècle au
          point I (fig.9).
               Dans tous les coudes brusques de ces rivières, des
          affouillements ou des mélanges de couches se
          produisent. J'ai pu en observer beaucoup et de très
          curieux, dont je reproduis ci-après quelques dessins
          (fig. 10 à 14).



          Fig. 9 - GISEMENT DE LA DEUXIEME BARQUE : COUPE DANS LE SENS
                   DE LA LIGNE INDIQUÉE EN 2 SUR LA PLANCHE XX.



          Fig. 10.



          Fig. 11.



          Fig. 12.- COUPE AU POINT D.



          
               En partant donc de la coupe type et tâchant toujours
          reconstituer l'état normal de la disposition des
          couches, on peut toujours arriver
          à leur restituer leur âge géologique et à aider l'archéologue à   
          dater exactement les objets de fouilles (voir coupes fig. 1 et    
          pl. XXII)
               Il faut évidemment, dans l'étude de ces anciens dépôts
          d'alluvion, toujours connaître exactement les terrains
          au sein desquels les cours d'eau se sont creusés; les
          coupes que j'ai pu étudier à Anvers. Stabroeck, Malines
          et Gand me l'ont démontrés.



          Fig. 14 - COUPE LONGITUDINALE DE J EN C (PLANCHE XX),
                    MONTRANT DEUX GOUFFRES CREUSÉS PENDANT LE NÉOLITHIQUE
                    ET UN GOUFFRE CREUSÉ AU XIE SIÈCLE ENTRE LES DEUX
                    AUTRES.


               Il résulte de l'étude d'ensemble de toutes les coupes
          relevées que les anciennes rivières avaient en
          moyenne de 12 et 15 à 20 et 40 mètres de largeur, et
          que cette largeur, aux temps les plus anciens,
          différait de 1 mètre en moins seulement; que la
          profondeur avait de 2 à 4 et 5 mètres; la planche XX
          montre parfaitement toutes ces caractéristiques.

               Cours primitifs des Schijns et de l'Escaut
                             à Anvers.

               Le plan n  II (pl.XXI) montre la reconstitution du
          tracé du cours des Schijns à Anvers; les coupes
          géologiques relevées sont indiquées par des traits
          transversaux.
               J'ai voulu montrer surtout que là où nos cartes
          actuelles ne portent plus trace d'indication de
          cours d'eau, existait tout un réseau de rivières, que
          toutes ces rivières s'enchevêtraient à l'infini, que
          leur direction habituelle était Nord-Est Sud-Ouest.
               En étudiant les anciennes cartes du XVIe siècles, nous
          voyons sur la rive gauche et sur la rive droite
          figurer, soit près de l'Escaut, soit assez loin de lui,
          de véritables dilatations irrégulières des rivières
          et dénommées Weelen; or, la géologie m'a permis de
          retrouver un de ces weelen de 1,000 mètres de long
          environ dans les bassins n  3, un autre de 500 mètres
          dans le bassin n  7, un encore de 200 mètres dans le
          bassin n  15, un de 100 mètres sur la rive gauche au
          Krankeloon; c'est donc que jadis, avant que l'Escaut
          fût organisé comme nous le voyons, Anvers avait un
          véritable système hydrographique spécial formé par une
          succession régulière de weelen souvent très larges et
          très longs, et reliés entre eux par d'innombrables
          bras de rivières.
               Ces weelen ayant existé avant le XIe siècle
          (la géologie le démontre), il est certain que l'idée
          émise de leur formation par ruptures de digues
          uniquement, tombe et que seule leur transformation
          au cours des siècles et leur grande variation de
          grandeur après le XVIe siècles résultent alors de
          ruptures de digues.
               La disparition de toutes les rivières dans le
          polder de Borgerweert sur la rive gauche, malgré
          l'existence de weelen encore actuellement, se comprend
          par l'absence de poussée des eaux, que les digues les
          empêchent d'entrer dans le polder et que la déclivité
          des terrains y est Sud-Est Nord-Ouest.
               Quelles sont donc alors les causes de l'organisation
          hydrographique de l'Escaut comme nous le voyons
          maintenant ? La variabilité des tracés des cours d'eau
          en terrain plat en est une, la main industrieuse de
          l'homme en est une autre, peut-être de légers
          affaissements de terrains encore une; mais une partie
          des causes nous échappera cependant longtemps encore.


                               IV.
                     Les rivières souterraines.

               Au cours de mes levés de coupes d'anciennes rivières
          en 1904, dans les bassins intercalaires (n  4), il
          m'a été donné d'observer une véritable formation
          indiquant un ruisseau souterrain faisant communiquer
          à grande distance des bras de rivières entre eux.




               La coupe sur 200 mètres de longueur entre deux bras
          de rivière montrait sous l'argile des polders la
          couche de tourbe fendue en deux et renfermant entre
          ses deux parties du sable fin avec des mollusques et,
          arrivée au bras de rivière, la couche sableuse se
          continuait dans une strate sableuse des alluvions
          supérieures (fig. 15).
               Il y avait donc une véritable filtration souterraine
          qui s'était établie entre les XIe et XVIe siècles.
               J'ai pu observer en 1905 les mêmes coupes curieuses sur
          100 mètres de long avec une orientation différente et aussi
          entre deux bras de rivières.



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